Des animaux sauvages dans la Seine ?

Un orque, un rorqual, un béluga, un phoque, un crocodile, une tortue alligator… Ces animaux ont été repérés dernièrement  dans la Seine,  deux sont finalement morts (l’orque et le béluga). Cette présence inhabituelle de mammifères marins perdus se retrouve également dans d’autres fleuves, et ce n’est pas un hasard.

Mardi 9 août 2022, 100 personnes étaient rassemblées pour une opération de retrait d’un béluga dans une enclave de la Seine. Malheureusement, l’animal était en mauvaise santé depuis plusieurs jours et a finalement dû être euthanasié.

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TROIS PISTES PRIVILÉGIÉES PAR LES ASSOCIATIONS DE PROTECTION DU MILIEU MARIN

Premièrement, le béluga était un jeune mâle dont le goût pour la découverte lui a fait quitter son groupe. Deuxièmement, une association évoque sa santé dégradée, ce qui expliquerait pourquoi il était perdu. Enfin, la troisième hypothèse penche davantage vers une nuisance sonore causée par un chantier à l’embouchure de la rivière Le Havre, qui aurait pu perturber le sens de déplacement de l’animal.

Cette dernière piste est pour le moment privilégié par Lamya Essemlali, la présidente de Sea Shepherd France, qui exprime son inquiétude : « ​​Les cétacés sont très sensibles au bruit et l’estuaire du Havre est une zone où le trafic maritime est très intense, ce qui a toujours été le cas. Récemment, le nouvel élément qui pourrait être en partie en cause est le chantier d’éoliennes au large de Courseulles-sur-Mer(…) »

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Elle rappelle que « les cétacés ont un sonar pour se déplacer et communiquer les uns avec les autres. C’est un élément essentiel à leur survie. Or la pollution sonore les désoriente et, dans le pire des cas, cela peut créer des lésions, des hémorragies internes ». 

Les bélugas sont des animaux à la société très complexe, composée de différents groupes avec des comportements différents, il faut donc faire attention aux hypothèses. Le fonctionnement social  de ces  cétacés est encore mal compris.

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UNE COMMUNICATION BROUILLÉE PAR LES ACTIVITÉS HUMAINES

Cette piste est aussi jugée « très probable » par Frédéric Le Manach, directeur scientifique de l’association BLOOM. Les mammifères marins disposent d’un système auditif très sensible qui leur permet de s’orienter dans leur environnement. Ils possèdent des sonars internes, dont les échos leur indiquent la distance, la nature du terrain environnant et la présence de leurs semblables : « leurs sonars peuvent être perturbés par les transports maritimes, les bateaux militaires qui utilisent aussi des sonars. On a régulièrement des cas dans le monde de cétacés qui échouent, qui se perdent ou qui deviennent sourds à cause des sonars liés aux activités humaines. »

De ce fait, ces perturbations acoustiques empêchent les cétacés de communiquer entre eux, de chasser, elles  peuvent même leur être fatales. Les autres activités humaines ont un impact très fort sur le milieu marin. D’après les chercheurs , la contamination chimique de l’eau, notamment celle associée aux eaux usées industrielles, a très probablement causé les problèmes digestifs constatés lors du bilan de santé du béluga.

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L’IMPACT DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE 

Les scientifiques expliquent que les changements dans les courants océaniques, dus aux effets du réchauffement climatique et à la fonte des glaces, pourraient faire partie des  raisons pour lesquelles ils errent. Après s’être perdus, les animaux marins ont à nouveau du mal, ce qui explique qu’ils n’arrivent pas à se sortir de ces situations compliquées.

Les courants océaniques jouent également un rôle important dans la migration. Lorsque les animaux migrent, ils les suivent. En fait, dans les courants océaniques chauds, ils trouvent plus facilement de la nourriture. Toute la chaîne alimentaire est enfermée dans ces lignes. Avec le changement climatique, les principaux courants océaniques changent, inversant leur sens. Ainsi, si les flux sont perturbés, le sens de l’orientation des animaux qui dépendent d’eux pour se nourrir est perturbé. Si les courants s’inversent et qu’il n’y a pas d’approvisionnement alimentaire là où il devrait être, les animaux mourront de faim ou migreront ailleurs.

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DES ANIMAUX SAUVAGES EN CAPTIVITÉ OU ABANDONNÉS

Une autre activité humaine dangereuse pour les animaux, c’est le trafic. Ces dernières années, une femelle crocodile, une tortue alligator et un python de 40 kg et de 3 m de long ont été retrouvés au fond de la rivière. Souvent, ce ne sont pas des animaux sauvages, explique Frédéric Le Manach, « ils sont détenus par des zoos, des parcs animaliers ou même par des particuliers. Parfois l’animal s’échappe, parfois ce sont les particuliers qui en ont marre et s’en débarrassent. »

Un sort tragique pour ces nouveaux animaux de compagnie, dont l’acquisition est  soumise à des lois plus ou moins strictes en fonction de la dangerosité de  l’espèce et de son statut de protection.

De nombreuses espèces exotiques sont encore achetées légalement ou non  par des particuliers sur un coup de tête. À l’âge adulte, la cohabitation humaine / autres animaux peut poser un réel problème de « vivre ensemble » compte tenu d’un environnement urbain, d’un espace et d’un climat inadaptés.

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Indicateur de la qualité de leur habitat naturel, les bélugas ont une durée de vie très longue et sont particulièrement sensibles à la pollution humaine. C’est à cause de nos actions que nous voyons disparaître des groupes de baleines ayant des problèmes de santé à cause de comportements déviants. L’accident de béluga doit devenir un symbole de protection de toutes les espèces dans leur milieu naturel.

Il faut cependant notifier que si un animal est isolé, cela ne veut pas forcément dire qu’il est en mauvais état. Certains dauphins et certains cachalots semblent  être de véritables explorateurs qui  peuvent ainsi  s’éloigner de leur clan et évoluer  seuls durablement. Ainsi, de nombreuses espèces de mammifères marins, notamment des espèces polaires, éloignées de leur habitat primaire ont déjà été signalées en France. En 2018, un béluga a aussi disparu après avoir passé trois mois à l’embouchure de la Tamise en Angleterre.

Romane

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Sources

https://www.huffingtonpost.fr/environnement/article/comment-le-beluga-et-d-autres-animaux-marins-se-retrouvent-ils-dans-la-seine_206433.html

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