FOCUS SUR LES MANCHOTS DU CAP

La réserve de Shamwari se situe à environ une heure et demie en voiture au Nord Est de la ville de Port Elisabeth, là où se trouve une société d’excursions en mer extrêmement impliquée dans la conservation des espèces marines et avec laquelle nous avons passé la journée : Raggy Charters.

L’argent récolté grâce à ces excursions est utilisé pour financer le « Baywatch Project » avec notamment le « STS Bunkering vs Endangered African Penguin projects », un programme centré sur la protection des manchots du cap de la baie d’Algoa.

L’Afrique du Sud est bordée à l’ouest par l’océan Atlantique Sud, à l’Est par l’Océan Indien. Dans ces mers, on retrouve une faune sauvage exceptionnelle, des mammifères marins observables toute l’année pour certains (otaries, dauphins…), seulement à certaines périodes de l’année pour d’autres (baleines à bosse, baleines australes…).

En ce qui concerne les oiseaux, il existe une espèce qui se différencie particulièrement des autres, par sa morphologie et son mode de vie, il s’agit du manchot du cap.

Le manchot du Cap est une espèce de la famille des Spheniscidae que l’on ne retrouve plus qu’en Afrique  du Sud et en Namibie. Son nom scientifique est : Spheniscus demersus (« demersus » signifiant « plonger »), mais en anglais, il a plusieurs noms  : African Penguin, Cape Penguin, Jackass Penguin, Black-footed Penguin, Spectacled penguin.

Source ; http://datazone.birdlife.org/species/factsheet/african-penguin-spheniscus-demersus

La population actuelle n’est plus estimée qu’à 180.000 adultes, les manchots du Cap sont classés « En Danger » sur la liste rouge de l’IUCN. Le déclin extrêmement rapide du nombre d’individus est dû plusieurs causes identifiées :

  • La pollution par les flaques de mazout, huile et pétrole, les pingouins les confondant avec des bancs de poissons, s’en approchent et se retrouvent alors englués.En 2020, un minéralier a de plus déversé accidentellement 1300 tonnes de fuel entre les îles de Robben et de Dasse et causé la mort, entre autres, de plus de 20000 manchots.
  • La pollution sonore (Algoa Bay est considérée comme la baie la plus bruyante au monde).
  • L’anthropisation des milieux : comme de nombreuses espèces dans le monde, les Manchots du cap ont vu leur habitat diminuer drastiquement par la pression humaine et industrielle.
  • Le ramassage de leurs œufs pour la consommation humaine, non réglementé pendant des décennies.
  • La collecte de leur guano : en effet ce guano, qui est en fait les excréments de ces oiseaux marins, s’est révélé très riche en composés azotés et a donc été récolté sans discernement et de matière intensive pour être utilisé comme engrais. Le problème est que les manchots utilisent leur guano comme matériau principal pour construire leur nid et y pondre leurs œufs. Sans cette couche protectrice (qui pouvait atteindre des dizaines de centimètres autrefois), les œufs sont pondus à même la falaise, surexposés à la chaleur et aux intempéries et sont de fait aussi plus vulnérables à l’attaque de prédateurs, notamment d’autres oiseaux marins comme le goéland par exemple.
  • Le manque de nourriture disponible. Les manchots mangent du poisson mais la surpêche a fait diminué drastiquement les stocks de poissons (anchois, sardines, harengs…) mais aussi ceux des petits céphalopodes et crustacés dont se nourrissent les manchots.

 

Sur l’île de Sainte Croix dont nous nous sommes approchés en bateau (il est aujourd’hui interdit d’y accoster sauf pour des raisons scientifiques), la population de manchots a diminué de 90 % en 14 ans.

Il ne reste plus qu’environ 3000 manchots résidant sur l’île qui est pourtant située dans une aire marine protégée où la pêche est interdite mais où le nombre de bateaux est très important, le trafic et la pollution sonore majeurs.

D’autres colonies existent sur la côte, notamment sur la Boulders Beach, une plage de la Boulders Bay, dans la banlieue du Cap, sur la côte Est de la péninsule près de Simon’s Town.

Cette colonie de manchots est un des attraits touristiques de la région, des infrastructures ont été installées pour mieux observer ces manchots mais des mesures protectrices pour les animaux ont été mises en place pour éviter leur dérangement devant l’afflux des visiteurs et le manque de discernement de certains touristes.

Des rangers surveillent aujourd’hui la colonie et des associations locales contribuent également à leur tranquillité.

Photo : Sophie Wyseur 2018

DIFFÉRENCES MANCHOT/PINGOUIN :

Beaucoup confondent pingouins et manchots, d’autant que manchot se dit « penguin » en anglais !

En français, le terme « Pingouin » désigne plusieurs espèces d’oiseaux qui vivent dans l’hémisphère Nord, de la famille des Alcidae. Ce sont des oiseaux marins de taille petite à moyenne qui se propulsent sous l’eau à l’aide de leurs ailes, et dont le corps est trapu et la queue courte. Il existe de nos jours plusieurs espèces au sein de cette famille, dont les mergules, les guillemots, les stariques, les macareux…et les pingouins !

Ils n’ont aucun rapport avec les manchots.

Une espèce de la famille des Alcidae, le Grand Pingouin († Pinguinus impennis), a été exterminée par l’homme au cours du xixe siècle, le seul représentant de l’espèce à l’heure actuelle est le Petit Pingouin (Alca torda) qui lui, vole (alors que le Grand Pingouin n’avait pas cette capacité).

La confusion entre les deux familles (Spheniscidae et Alcidae) vient justement de cette espèce désormais éteinte.

Le grand pingouin vivait en grand nombre au nord du Canada, en Islande et sur des îles britanniques. D’après l’article paru dans Géo, « il fut exterminé par les marins qui le chassaient pour s’en nourrir, et les dernières observations certaines datent d’avant le milieu du XVIIIe siècle. Lorsque les marins européens partirent en exploration dans les mers australes, ils y découvrirent d’immenses colonies d’oiseaux marins : des… manchots. Or ces derniers étaient en apparence très proches du grand pingouin que les matelots avaient vu dans les mers de l’hémisphère Nord.

 Au XVIIIe siècle, le naturaliste français Buffon attribua la découverte des manchots à des marins hollandais, en 1598 en Patagonie, qui les auraient nommés pinguins.

 Buffon distingua les deux familles et garda logiquement le nom d’origine, « pingouin », pour désigner les alcidés de l’hémisphère Nord, tandis qu’il attribua le nom de « manchots » aux oiseaux découverts dans les mers australes, en référence à leurs ailerons.

Les anglophones, eux, désignaient le grand pingouin par le terme penguin. Mais après la découverte des manchots de l’hémisphère Sud, ils leur appliquèrent ce terme et changèrent le nom du grand pingouin du Nord en Great Auk. Bref, tout l’inverse… »

Razorbill Alca torda, Caithness, Scotland

LE DERNIER DES SIENS :

Le livre » le dernier des siens » de Sibylle Grimbert, raconte de façon romancé la vie de ce dernier Grand Pingouin.

L’œuvre a été désignée lauréate dans la partie roman du prix Maya décerné samedi 17 juin à Tours et dont Sophie, notre vice-présidente, est membre du jury. Ce livre raconte la vie de ce dernier pingouin, à travers la complicité qu’il construit avec un humain, sans jamais tomber dans la sensiblerie, l’anthropomorphisme ou les clichés.

Très réussi, ce roman nous entraîne dans une réflexion sur la notion d’amour, de respect et sur notre implication dans la perte irréversible de tant de formes de vie sur cette planète.

Sophie Wyseur

Sources

https://www.geo.fr/environnement/quelle-est-la-difference-entre-un-manchot-et-un-pingouin-197833#:~:text=En%20fran%C3%A7ais%2C%20le%20terme%20%22manchot,les%20guillemots%20et%20les%20macareux.

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=pfbid0tHWUHEwkBYwCdVptHVuL3KoSBJMriqqehjVQBS84aufRJ7BNGVXw5bjY4vrTCUmQl&id=100064779093883https://www.raggycharters.co.za/page/about-ushttps://www.raggycharters.co.za/page/sts-bunkering-vs-endangered-african-penguin