Qui sont les lémuriens ?

D’où viennent-ils ?

Les Lémuriens sont de Primates endémiques de Madagascar.

Leurs ancêtres sont arrivés du continent africain par dispersion sur des tapis de végétation, en traversant le canal de Mozambique, à une époque où les courants et la géographie des continents étaient favorables à une telle opportunité.

Ce processus a commencé il y a environ 65 Millions d’années et s’est poursuivi pendant plusieurs Millions d’années, jusqu’au moment où il est devenu impossible, isolant ainsi du reste du monde cet infra-ordre de primates que sont devenus les Lémuriformes.

Ces animaux ont donc évolué uniquement à Madagascar, bénéficiant d’une absence de prédateurs et de conditions environnementales satisfaisantes, ce qui leur a permis d’acquérir une diversité morphologique exceptionnelle et d’être encore aujourd’hui l’infra-ordre de primate le plus représenté en nombre d’espèces (111 répertoriées par l’ONG Lemur Conservation Network).

Les premiers humains arrivent à Madagascar il y a environ 2000 ans et sont responsables de la disparition du plus gros lémurien qui vivait jusqu’alors sur l’île ; Archaeindris fontoynonti pouvait atteindre la taille d’un gorille mâle adulte et peser 200 kg.

De nos jours, les poids varient en fonction des espèces, le plus petit lémurien fait environ 30 grammes à l’âge adulte, le plus gros ne dépasse pas les 10 kg.

Une espèce en danger

En 2019, on sait que 95% de la population de lémuriens est en déclin, c’est le primate le plus menacé d’extinction sur Terre.Tout un infra- ordre de mammifère est en train de disparaître de la planète, à cause de l’activité humaine :

– Perte d’habitat par l’envahissement des populations humaines

– Exploitations minières des minerais précieux ou semi-précieux responsables de nombreux problèmes de pollution (et dont les fonds générés sont détournés pour la contrebande)

– Déforestation pour le trafic illégal de bois précieux, coupe des arbres pour faire du charbon de bois bon marché, brûlis pour l’agriculture et l’élevage du bétail

– Chasse pour la viande

– Etc.

De plus, la mondialisation et l’immigration brisent certaines coutumes liées au lémurien qui perd le caractère sacré qui le protégeait.

Dans certaines régions, le fady, tabou culturel, protège encore les lémuriens, mais dans d’autres, la viande de lémurien est considérée comme une source de protéines non négligeable.

Pourtant sur le papier, Madagascar est plutôt bon élève en ce qui concerne la conservation des espèces et la biodiversité puisque plusieurs conventions ont été ratifiées : 4 conventions internationales, dont la CITES, des conventions africaines et des législations nationales (même si il a fallu attendre 1962 pour que des textes soient mis en place pour protéger les lémuriens).

Mais les lois ne sont pas appliquées et les sanctions souvent inexistantes ou peu dissuasives.

D’ailleurs, la population n’est souvent même pas au courant des lois en cours, et la pauvreté générale fait que toute ressource est bonne à exploiter, la notion de développement durable n’existe pas pour une population qui peine à subvenir à ses besoins de base quotidiens.

Le manque d’éducation, de sensibilisation, de méthodes alternatives pour les populations, la corruption de l’état, le manque de vision à long terme, tout cela contribue à provoquer un effondrement de la biodiversité dans un pays si riche en ce domaine initialement.

La perte d’un habitat naturel

Plus que la perte de l’animal en lui-même, la disparition du lémurien provoquerait l’éradication des forêts malgaches car les lémuriens sont frugivores et dispersent les graines au cours de leurs déplacements à travers l’île via leurs excréments.

La disparition des lémuriens entraînerait donc des réactions en chaîne : la disparition des forêts restantes et des animaux qui dépendant de ces forêts pour vivre…

La protection de cette espèce a donc une portée plus globale sur la conservation des écosystèmes forestiers de Madagascar.

Les bucherons- braconniers, comme on les appelle, sévissent partout dans les réserves et sont couverts par les villageois car ce sont souvent des membres de la famille. De ce fait, ils sont prévenus avant l’arrivée des forces de police. Dans d’autres cas, les braconniers règnent par la peur et l’intimidation et sèment la terreur chez les villageois.

Madagascar perd donc chaque année entre 50 et 100 000 hectares de couverture forestière (sur 9 Millions d’hectares). En 1950, les arbres couvraient 26 % de la surface de l’île, la forêt ne représente plus que 16 % de la surface nationale aujourd’hui.

Un animal emblématique

Cependant, le lémurien reste une espèce emblématique pour les malgaches : il est à Madagascar ce qu’est le Panda en Chine.

Présent sur les billets de banque, donnant son nom à l’équipe de rugby national (les Makis), représenté sur de nombreuses enseignes … lémurien est synonyme de Madagascar.

Des touristes du monde entier viennent sur l’île pour le découvrir et avoir la chance de l’approcher.

Consommer de l’animal

Cependant, si les gens souhaitent de plus en plus pouvoir observer ces animaux libres dans leur milieu naturel en arpentant les réserves en compagnie d’un guide local, nombre de touristes de toute nationalité souhaite encore toucher, interagir avec les lémuriens, favorisant ainsi le trafic de ces animaux. En effet, pour satisfaire la demande des touristes, les locaux capturent les jeunes et les maintiennent en captivité dans de plus ou moins bonnes conditions.

Les lémuriens servent alors pour les selfies, pour attirer le touriste dans des restaurants, des places, des magasins, des hôtels… Le marché des lémuriens, capturés en milieu naturel, puis vendus comme des animaux domestiques, est en plein développement.

Ils sont :

  • soit achetés par des particuliers qui n’ont aucune connaissance des besoins biologiques des lémuriens.
    Selon une étude récente ( fin 2015)  réalisée par Temple University de Philadelphie, 28000 lémuriens sont détenus chez des particuliers.
  • soit par des hôteliers qui s’en servent comme argument de vente pour attirer les clients.
    Une analyse de sites webs et de pages de réseaux sociaux a montré que sur 171 hôtels, 15% semblent détenir des lémuriens en captivité.

Des humains au secours des lemurs

Il existe cependant des associations internationales et locales qui se battent au quotidien pour préserver les espèces, éduquer les populations locales afin qu’elles deviennent des partenaires à part entière de la sauvegarde des lémuriens.

Ainsi, le Lemur  rescue center récupère les Lemur Catta qui sont saisis chez les particuliers, reconstituent des groupes sociaux, leur réapprend progressivement la vie sauvage et les relâche quand c’est possible dans des aires protégées.

Planet Madagascar, Anja Community Reserve, Duke Lemur Center mais aussi la WWF et Aspinall foundation pour ne citer que celles-là, sont très actives aussi pour la sauvegarde des lémuriens.

Les centres qui récupèrent les lémuriens observent chez les rescapés différents niveaux de traumatismes en fonction des méthodes utilisées pour leur capture, leurs conditions de détention et leur alimentation.

Bien souvent, pour récupérer un jeune, la mère a été tuée et le petit arraché de ses bras. Ensuite, les animaux sont maintenus soit en semi-liberté, soit dans des cages exigües, attachés par le cou ou l’abdomen par des cordes leur infligeant des blessures. D’autre part, ils sont sous alimentés ou malnutris, ne reçoivent pas de soins médicaux. Les réhabituer à une vie sauvage et autonome est donc souvent un challenge.

Parfois, ils sont remis en semi-liberté près de sites touristiques pour attirer les touristes mais ils arrivent que certains souffrent de troubles comportements à la suite des traumatismes qu’ils ont subi, deviennent très agressifs et dangereux pour la population humaine et sont donc sacrifiés au nom de la sécurité publique.

Aller plus loin
http://lagazettedesethologues.over-blog.com/2015/11/l-impact-de-l-homme-et-le-commerce-illegal-des-lemuriens-a-madagascar.html

https://www.nature.com/articles/s41558-019-0647-x?fbclid=IwAR1R-V3XJgvhP0KXh35BYZRvYghCcrmlKzWAqh7IbTp-wJURppQp5yGYj4s