Le commerce des animaux sauvages et le Covid19

Depuis janvier 2020, Code Animal a rejoint l’équipe “wildlife” de l’organisation Eurogroup for Animals afin de travailler sur les questions relatives aux animaux sauvages exotiques captifs pour les divertissements à échelle européenne. Eurogroup rassemble 70 associations et organisations de la protection animale dans toute l’Union Européenne.

SITUATION ACTUELLE

Au moment où ce texte est écrit, le SARS-COV-2, le virus responsable du Coronavirus, continue de se répandre autour du globe, causant saccage économique, panique et confusion et impactant des millions de personnes dans le monde entier.

Alors que la recherche n’a pas encore exactement établie la source réelle du virus, il est fortement soupçonné d’avoir été transmis de la faune sauvage aux humains en raison de la proximité et de la grande variété d’espèces vendues sur les marchés humides asiatiques, en mutant à travers les espèces pour devenir un nouveau virus chez l’homme.

Comme le SARS-COV-2, beaucoup de virus peuvent être transmis entre animaux et d’animaux à humains; en effet plus de 60% des maladies infectieuses humaines reconnues sont des «zoonoses» (maladies qui peuvent se répandre d’animaux à humains), et environ 75% des maladies infectieuses émergentes qui ont infecté les populations durant les trente dernières années étaient d’origine animale.

En fait, les scientifiques ont probablement identifié seulement une fraction des virus qui ont co-évolué dans une variété d’animaux sauvages, et une large diversité de virus restent à identifier dans la faune sauvage.

Un article récent déclare qu’environ 1,6 million d’espèces virales restent à découvrir au sein des mammifères et des populations d’oiseaux;de ceux ci, environ 650 000 à 840 000 ont la capacité d’infecter et de causer des maladies humaines.

Cependant, les animaux sauvages ont transporté des virus depuis des millénaires. Ce qui a changé est la façon dont les humains interagissent avec eux, dû à l’urbanisation, la destruction des habitats naturels de la faune sauvage et le développement du trafic légal et illégal d’animaux sauvages.

POURQUOI EST CE IMPORTANT

L’exploitation croissante des animaux sauvages comme animaux de compagnie et les échanges internationaux placent la biodiversité sous une insoutenable pression et entraîne des risques accrus pour le bien-être animal et la santé humaine et animale.

Ce n’est pas seulement un problème pour les pays asiatiques, où le COVID-19 et de précédents coronavirus ont émergé.

L’union européenne est une destination principale pour les animaux sauvages vivants, dont les primates, reptiles et amphibiens.

En 2018, la valeur déclarée du trafic illégal dans l’UE était d’au moins 2,3 millions d’euros.

Les animaux introduits illégalement en contrebande ont probablement été transportés en milieu confiné dans des conditions insalubres et présentent donc un risque très clair d’infection zoonotique.

Des milliers d’animaux sauvages sont également échangés à une beaucoup plus grande valeur économique, transportés et gardés comme animaux de compagnie dans les foyers européens sans aucun contrôle sanitaire.

Les vendeurs d’animaux sauvages ne sont pas sujets aux précautions sanitaires exigées comme les autres industries de l’UE qui fournissent des produits au public.

Certains de ces animaux sont capturés dans la nature ou nés en captivité et potentiellement gardés dans des conditions sanitaires identiques à celles des marchés africains ou asiatiques, avant d’être transportés dans les foyers européens.

Durant ces dernières années, dû à l’explosion des animaux exotiques comme animaux de compagnie, au commerce des animaux sauvages élevés en captivité et aux échanges conséquents dans le monde entier d’animaux sauvages aux conditions de santé inconnues, le potentiel de transmission de maladies zoonotiques a augmenté considérablement.

Par exemple, entre 2015 et 2019, il y avait au moins 61 primates secourus dans l’union européenne qui étaient infectés par une ou plusieurs infections virales potentiellement transmissibles à l’homme.

Les maladies d’animaux exotiques ne sont pas seulement dangereuses pour l’homme, elles peuvent être aussi transmises aux animaux indigènes, avec des conséquences désastreuses sur leur conservation.

L’un des exemples les plus révélateurs de maladie introduite qui s’est répandue  parmi la faune sauvage locale est celui du pathogène amphibien Batrachochytrium salamandrivorans. Ce pathogène natif d’Asie a été introduit en Europe il y a quelques années avec des amphibiens importés par le trafic d’animaux de compagnie exotique.

En conséquence de cela, au moins un tiers des espèces d’amphibiens font face à l’extinction à travers le monde, avec au moins 90 espèces confirmées éteintes et 500 espèces en déclin.

La maladie a récemment causé l’extinction locale de la salamandre tachetée (Salamandra salamandra) aux Pays Bas et leur raréfaction dans les autres pays d’Europe.

La propagation globale du B.Sal a été décrite comme une cause de «panzootique», l’équivalent de la pandémie chez les humains.

LA POSITION D’EUROGROUP FOR ANIMALS

L’UE doit prendre des responsabilités dans la lutte contre le commerce d’animaux sauvages et démontrer que la leçon du Covid-19 a été retenue.

La commission européenne est actuellement en train de rédiger la stratégie pour la biodiversité jusqu’à 2030, un élément crucial du Green Deal de l’UE et une excellente occasion d’agir.

Ce document, si assez ambitieux, peut initier un changement décisif de direction pour les politiques de l’UE sur le commerce des espèces sauvages.

Eurogroup for Animals pense que:

  • L’UE devrait encourager les gouvernements d’Europe et à l’échelle mondiale à fermer les marchés de faune sauvage rapidement et définitivement.

Cela inclut les marchés d’animaux vivants et les marchés alimentaires d’animaux sauvages dans les états membres de l’UE.

  • Nous pensons que les animaux sauvages ne devraient pas être vendus comme animaux de compagnie.

Comme premier pas dans cette direction, la stratégie de l’UE pour la biodiversité à l’horizon 2030 devrait inclure des actions spécifiques pour réguler efficacement le trafic d’animaux exotiques de compagnie au sein de l’UE, protégeant ainsi la santé des citoyens européens, améliorant le bien être des animaux et sauvegardant la biodiversité européenne et globale des risques posés par le commerce actuel mal réglementé d’animaux sauvages vivants.

  • Une liste officielle à l’échelle de l’UE, indiquant quelles espèces animales sont les plus adaptées et les plus sûres à être utilisées en tant qu’animaux de compagnie devrait être adoptée.

Une telle liste, un instrument préventif par nature, a déjà été introduite avec succès en Belgique et au Luxembourg et est développée au Pays Bas.

Le système de liste positive est une politique profondément transformatrice qui coche de nombreuses cases incluses dans le Green Deal européen: il fournit un mécanisme préventif avec le principe principal de «ne pas nuire», il permettra aux consommateurs de faire des choix éclairés et durables et est basé sur des informations fiables, comparables et vérifiables.

  • Les gouvernements européens devraient adopter des mesures d’urgence visant à aider les centre de secours et sanctuaires.

Ces installations, qui jouent un rôle crucial au côté des nations, dans la lutte contre le trafic de faune sauvage et qui assurent le bien être des animaux confisqués, font face à une réduction dramatique de leurs revenus à cause des fermetures obligatoires liées au COVID-19.

  • L’UE devrait informer clairement contre l’utilisation d’animaux sauvages pour la production de médicaments traditionnels distribuée dans l’UE et hors UE.
  • Les gouvernements nationaux d’Europe et du monde entier devraient définitivement bannir l’importation de trophées de chasse. Pas seulement parce qu’ils peuvent être vecteurs de maladies mais aussi parce que cette activité contribue à l’exploitation des ressources naturelles en mettant une pression insoutenable sur la biodiversité, ce qui est lié à la propagation du Covid-19.
  • L’UE devrait maintenir et renforcer son leadership global dans la continuité de la lutte contre le trafic d’animaux sauvages et pour relever les défis croissants auxquels sont confrontées les espèces menacées par le commerce illégal et légal.

Par exemple, l’UE devrait interdire le commerce des tigres et des parties de tigres élevés en captivité, car ce commerce sape efficacement les efforts internationaux pour mettre fin au commerce illégal et au braconnage.

Le plan d’action européen post 2020 contre le trafic d’animaux sauvages devrait être complètement intégré à la stratégie pour la biodiversité de 2030 et devrait bénéficier d’un financement adéquat.

DÉFINITIONS

Animaux sauvages: les espèces dont les populations existent encore à l’état sauvage, dans le pays d’origine – c’est-à-dire une espèce dont le comportement collectif, le cycle de vie ou la physiologie reste inchangé par rapport à la nature sauvage malgré les conditions d’élevage et de vie des animaux individuels étant sous contrôle humain pendant plusieurs générations.

Marchés de faune sauvage: tout marché vendant des animaux sauvages vivants, capturés dans la nature ou élevés en captivité.

Bushmeat marchés: marchés vendant de la viande d’espèces sauvages qui sont chassées dans les forets tropicales.

Voir dossier de Code Animal sur la viande de brousse

Animaux exotiques: les animaux sauvages vendus et / ou gardés comme animaux de compagnie.