La noix de coco, l’envers du décor : un enfer pour les singes.

Et si votre noix de coco avait été récoltée par un singe ? Peta Asie (People for the Ethical Treatment of Animals) a récemment dévoilé des photos et vidéos provenant de visites de pas moins de huit fermes où les singes sont exploités pour la récolte de noix de coco.

Les cocotiers, également nommés « arbre aux cent usages » ou « arbre de vie », permettent de produire une palette diverse de produits (yaourt, lait, crème, huile, beurre, farine, sucre, fruits frais/secs, ou encore objets) de plus en plus accessibles en supermarché. Ils ont peut-être été produits grâce à ces singes cueilleurs avant d’être vendus partout dans le monde.

Fruit exotique répondant à une tendance, la noix de coco est souvent mise en avant pour ses nombreuses vertus : confort digestif, satiété, hydratant, contre l’hypertension, source d’énergie/fer/cuivre/phosphore/manganèse, etc. Poussant ainsi les consommateurs à acheter dans le but d’une alimentation plus équilibrée, plus saine.

Ce fruit est récolté dans plusieurs régions du monde, comme le Brésil, la Colombie ou l’île d’Hawaï. Toutefois, ces pays de production se distinguent de la Thaïlande, car les fruits seraient ramassés uniquement par des êtres humains ou à l’aide de technologies plus avancées.

Photo : Peta Asie

La noix de coco ne pèse pas moins de 2,2 milliards d’euros par an dans le commerce international, un business devenu juteux pour les producteurs qui cherchent un rendement maximal.

Deux producteurs thaïlandais majeurs de produits dérivés de la noix de coco sont aujourd’hui pointés du doigt pour recourir à ces méthodes dépourvues d’éthique en exploitant les macaques à queue-de-cochon.

Vivement encouragés par Peta, quelques grandes chaînes américaines (Wlagreens, Duane Reade et Boots) et revendeurs britanniques (Waitros, Co-op, Morrinsons, Sainsbury’s ans Asda) ont arrêté tout commerce avec la Thaïlande concernant ces produits.

Tesco via leur porte-parole a déclaré à la BBC que « notre lait de coco et notre eau de coco de marque propre n’utilisent pas de main-d’œuvre de singe dans leur production (…) Nous ne tolérons pas ces pratiques et nous retirerons de la vente tout produit dont on sait qu’il a été fabriqué avec de la main-d’œuvre de singe. »

La chaîne Morrisons a également retiré les produits qui auraient été produits grâce à l’exploitation animale.

Enfin, Sainsbury’s a déclaré être « en train de revoir nos gammes et d’enquêter sur cette question complexe avec nos fournisseurs. »

En effet, en achetant ces produits-là, c’est cette pratique « des singes-esclaves » qui est indirectement soutenue. D’autant plus que 95 % des noix de coco philippines ou thaïlandaises proviennent de petits producteurs qui sont obligés de se tourner vers cette méthode.

Si sa consommation peut donner un goût d’exotisme, les singes eux n’ont pas de vacances. Arrachés à leur milieu naturel et familial, enchaînés, enfermés, secoués, tirés, isolés et exploités — ils sont réduits en esclavage, et ce 9 heures par jour, contraints par la force à ramasser quotidiennement plus de 1 000 noix de coco (contre 80 pour un homme).

Enlevés alors qu’ils sont bébés, les macaques à queue-de-cochon ou Macaca nemestrina, proviennent des îles de la Sonde. Ils tirent leur nom de leur petite queue en tirebouchon, similaire à celles des cochons.

Issus des forêts tropicales humides de l’Asie du Sud-Est (Thaïlande, Laos, Cambodge, Vietnam, Malaisie et dans le nord-est de l’Inde et le sud de la Chine), avec des températures avoisinant les 18 à 30 degrés. Ils vivent en grands groupes (entre 15 et 40 individus) et ne se séparent que durant la journée pour aller chercher de quoi se nourrir.

Wikipédia

Ces frugivores peuvent peser entre 5 et 15 kilos (pour les mâles robustes) et on une longévité de vie moyenne allant jusqu’à 25 ans. Ils ont la faculté d’être très agiles, pouvant ainsi grimper en hauteur (où ils passeraient une grande partie de leur journée) afin d’y trouver leur nourriture.

Les macaques à queue-de-cochon ont un véritable impact sur l’écosystème, car en se nourrissant de fruits, feuilles et autres végétations, ils participent à la fertilisation des sols en y répandant les graines.

Leur plus grande menace est l’homme, qui les chasse pour leur chair, leur utilisation médicale ou de recherches, mais également en détruisant leur habitat naturel (Cawthon Lang, 2009).

IUCN – red list

Classée « en danger » c’est-à-dire « risquant de disparaître à court ou moyen terme » par l’UICN (International Union for Conservation of Nature ou Union Internationale pour la Conservation de la Nature), et prévue dans les  Annexes II de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction) ou Accords de Whasington (correspondant à la « liste d’extinction, pourraient le devenir si le commerce de leurs spécimens n’était pas étroitement contrôlé. »), l’espèce des macaques à queue-de-cochon est menacée d’extinction.

Photo : Peta Asie

« Un enquêteur a vu des singes transportés dans des cages exigües, à peine assez grandes pour qu’ils puissent se retourner, et d’autres, laissés dans des cages à l’arrière d’une camionnette sans abri contre la pluie battante. Un singe a été vu en train de secouer frénétiquement les barreaux de sa cage dans une vaine tentative de fuite. »

Des êtres sentients vulgarisés à l’état d’outil, la négation du vivant est frappante. La banalisation cette exploitation — via l’achat des produits issus de leurs récoltes — est le plus grand danger pour ces singes.

Ils sont également envoyés en école de dressage, dans le but d’asseoir l’autorité humaine et d’éviter une rébellion, mais également afin que leur travail soit rentable pour leur nouvel employeur/exploiteur.

À ce sujet, The First Monkey School explique qu’il « n’est pas si difficile d’entraîner un singe. La clé est d’être patient. Les humains et les singes sont très différents. Nous ne pouvons pas leur expliquer les choses en utilisant des mots, mais nous pouvons être patients et les entraîner graduellement à faire certaines choses. Si nous répétons suffisamment ce processus, nous réussissons. » 

« Faire sentir le singe en confiance dans son nouveau milieu sera la tâche la plus difficile du maître. »

Photo : Peta Asie

Le quotidien de ces singes est à peine imaginable. Munis, dès leur enlèvement, d’un imposant collier métallique, ils doivent arracher des noix de coco (chacune pouvant peser jusqu’à 1,5 kilo) dans des hauteurs pouvant aller jusqu’à 25 mètres.

S’ils ne sont pas assez dociles ou montrent des signes de révoltes, leurs canines sont tout simplement sont arrachées pour qu’ils ne puissent nuire à leur geôlier.

Avant ou après leur longue journée de labeur, et pour être encore plus lucratifs, ils sont contraints de faire du vélo, du basket afin de divertir les touristes et de participer à des compétitions de ramassage le plus rapide de noix de coco (entre congénères).

Selon les enquêteurs de Peta Asia, ces singes « présentaient des comportements indiquant un stress extrême » et « étaient enchaînés à de vieux pneus ou confinés dans des cages à peine assez grandes pour qu’ils puissent se retourner ».

Photo : Peta Asie

Comment savoir si un produit est issu de l’exploitation des singes cueilleurs ?

 Tout d’abord, afin d’être parfaitement sûr de ne pas contribuer à cette exploitation, il convient de s’éloigner des producteurs thaïlandais en général, sauf dans la mesure où une indication indiquerait que les singes n’ont pas été exploités (comme c’est le cas de la marque Autour du Riz).

Il existe également des labels respectueux des animaux permettant d’indiquer qu’aucun animal n’a été utilisé dans la production, comme c’est le cas de One Voice C ou encore le V-label (vegan uniquement) .

Plusieurs marques ont été contactées afin de savoir si des singes étaient utilisés pour la production de leurs produits. À ce titre, Bjorg, Léa Nature/Jardin Bio affirment que nul singe n’a été exploité pour la production de leur gamme de produits.

Enfin, cette pratique n’est malheureusement pas isolée et les animaux continuent à être réduits à un statut d’outil ou d’objet ayant pour seule finalité d’être utilisé, usé au service de l’homme, ne pouvant ainsi pas jouir de leur propre existence.

À ce titre, quelques exemples : les crashs tests des voitures (toujours d’actualité en Chine) ; les envois dans l’espace (chimpanzés chiens, lapin, souris, rats, chat, tortue) ; le transport de touristes (par des éléphants, ânes, dromadaires) ; l’entrainement militaire sur des animaux (comme le cochon) ; les expérimentations médicales ; publicités/clip/émissions ; expériences et tests sur les animaux ; combats d’animauxprostitution des orangs-outangs femelles en Asie, etc.

Exploités et non employés/volontaire, le vocabulaire utilisé est donc à choisir avec soin. A contrario, l’exploitation animale passe pour un fait insolite et perd de sa signification et banalise son caractère cruel. Cela a notamment été le cas avec Santisuk : un chimpanzé ayant « rejoint » la police thaïlandaise et qui fut ensuite entraîné à ramasser des noix de coco pour « aider » les locaux — chacun de ses services étant récompensé par une bouteille de lait.

Les animaux ne consentent pas à un contrat qui les lierait de manière indéfinie et sans contrepartie aucune, à une vie loin de leurs terres et de leur famille, pour des activités dénuées de sens à leurs yeux mais surtout, pouvant aller à l’encontre de leur nature physiologique. Souvent considérés comme une catégorie d’êtres vivants bien distincte des hommes faute de langage commun, ils deviennent les meilleurs associés/collaborateurs/employés lorsqu’il est question de leur utilité.

L’exploitation animale suggère toujours la pratique de la torture (physique ou psychologique) en amont et/ou des souffrances physiologiques sévères (certains gestes n’étant pas adaptés à l’espèce).

Si l’on parle de découvertes scientifiques majeures, ou d’exploitation nécessairement utile à l’homme, il est important de considérer qu’une alternative est toujours possible.

La protection d’un animal sauvage passe par la protection de son habitat naturel respectant ses impératifs physiologiques. Ainsi seulement le respect des êtres vivants sentients est assuré.

Pénélope Ehles

Sources :